Description : Introduction : le devenir des personnes âgées est un sujet majeur d’actualité, l’importance
d’une refonte du système d’aides et de services en adéquation avec les besoins et
les volontés de la population est connue, et cette refonte est en cours. Il n’empêche
que l’opinion des personnes âgées est encore demandée trop souvent tardivement lorsque
la perte d’autonomie est déjà avancée et que les prises en charge peuvent alors se
faire dans la précipitation. Le médecin traitant apparaît le plus souvent comme le
premier intervenant face au sujet de la perte d’autonomie, surtout lorsqu’il a assuré
le suivi de son patient sur de longues années. La présente étude s’interroge donc
sur l’implication des personnes âgées en bonne santé par rapport à une potentielle
perte d’autonomie future ; elle se concentre en particulier sur leurs représentations
et leurs ressentis face à cette situation. Elle s’intéresse ensuite à l’approche de
ce sujet avec leur médecin traitant et cherche à connaître les attentes des patients
vis-à-vis de ce professionnel. Méthode : il s’agit d’une étude qualitative, ayant
permis de réaliser 15 entretiens semi-dirigés, individuels, de patients âgés en bonne
santé, à partir de l’âge de 65 ans ; les critères d’inclusion étaient l’absence d’aide
à domicile et l’autonomie dans le quotidien. Le recueil et les entretiens se sont
faits dans trois cabinets de médecins traitants. Chaque patient a été interrogé dans
la salle de consultation habituelle de son médecin. Résultats : les comportements
des personnes âgées dites en bonne santé sont variés autour de leur implication sur
une perte d’autonomie future : anticipation extrême, tabou du sujet mais plan d’avenir
tracé, déni et refus du sujet avec souhait d’attendre le dernier moment pour agir…
Des ressentis sont aussi mentionnés autour de leurs expériences de la perte d’autonomie,
de la prévention du vieillissement, de la notion d’être utile jusqu’à la fin de sa
vie, et du rôle joué par le conjoint et la famille dans la perte d’autonomie. D’autre
part, il est mis en évidence que le sujet n’est que rarement abordé avec le médecin
traitant, en amont de la perte d’autonomie. Les attentes sont nombreuses envers le
médecin traitant mais concernent souvent une perte d’autonomie déjà effective et ne
se rattachent qu’au rôle « de soin » du médecin traitant. Discussion : une différence
notable entre santé ressentie par le patient âgé et santé réellement constatée par
le médecin est mise en avant. Deux catégories principales de personnes apparaissent,
découlant de facteurs variés comme le tempérament, le sexe, la santé et l’autonomie
réelles, le rejet ou non d’une dépendance. Enfin plusieurs hypothèses sont avancées
sur un lien possible entre un âge moins avancé et une implication plus importante
dans l’anticipation d’une future perte d’autonomie. La recherche, par les médecins
traitants, de signes de fragilité mais surtout la prévention de la perte d’autonomie
sont majeures et semblent non suffisantes actuellement. Les raisons de la difficulté
à aborder le sujet en médecine générale sont nombreuses. Il s’agit toujours d’un sujet
tabou, méconnu. Le rôle du médecin traitant semble être d’éveiller une réflexion chez
le patient sur son devenir, pour que ce sujet revienne plus facilement dans les consultations
futures et que le médecin puisse y apporter une aide adaptée. Une recherche sur les
moyens d’allier prévention de la perte d’autonomie et médecine générale pourrait ouvrir
de nouvelles perspectives d’avenir.;