Description : Dans le secteur des soins primaires, ces dernières décennies sont marquées par le
développement des maisons de santé pluriprofessionnelles, permettant à des professionnels
libéraux de bénéficier de financements publics en échange d’une coordination pluriprofessionnelle
accrue. Leur essor s’accompagne de l’apparition de financements collectifs et complémentaires
au paiement à l’acte. À partir de 2019, deux expérimentations de financement visent
à augmenter la collectivisation des professionnels de santé afin de les responsabiliser
malgré leur statut libéral, en leur attribuant le mérite de résultats de santé. Ces
expérimentations sont promues par des économistes administratifs, et relayées par
des médecins généralistes libéraux, entrepreneurs de ces réformes. Comment expliquer
cette alliance a priori improbable, entre des médecins historiquement attachés à leur
autonomie libérale, et des pouvoirs publics soucieux de réformer l’exercice libéral ?L’enquête
qualitative, conduite de 2019 à 2023, mobilise l’observation de réunions liées à la
mise en œuvre des expérimentations, et une centaine d’entretiens semi-directifs avec
des acteurs administratifs et des professionnels de santé. Ma thèse montre l’existence
d’une communauté d’acteurs qui se mobilisent autour de la promotion des expérimentations
tout en effectuant des compromis réciproques. Les économistes administratifs amendent
les modèles économiques pour préserver leur relation avec les médecins. Certains médecins,
acculturés à l’économie, cherchent à présent à organiser les soins selon cette logique.
Pour autant, les médecins généralistes réaffirment une place centrale dans les relations
entre groupes professionnels.;