Description : Au sein du Service d’Accueil des Urgences (SAU), jusqu’à 40 % des diagnostics omis
sont des fractures. Il peut en résulter de lourdes conséquences pour le patient et
également pour la structure de soin. Les radiographies dans les situations d'urgence
sont souvent lues par nécessité par des cliniciens en médecine d'urgence qui manquent
d'expertise surspécialisée en radiologie et en traumatologie. De plus, le flux continu
élevé de patients dans les urgences cause une fatigue et une susceptibilité aux erreurs
d’interprétation. L’intelligence artificielle pourrait être utilisée comme un outil
d’aide aux urgentistes afin de faire face au volume et à la charge de travail sans
cesse croissante (4). Ainsi, nous souhaitons mener cette étude afin d'évaluer les
performances d'un logiciel d’intelligence artificielle dans l'évaluation des fractures
dans des conditions réelles d’utilisation et de définir sa place dans la démarche
diagnostique. Matériels et méthodes : Cette étude prospective monocentrique a été
menée sur 1808 radiographies standards de 1523 patients ayant consulté aux urgences
de l’hôpital Sud du CHU de Grenoble du 26 avril au 18 juin 2022. Les radiographies
de patients mineurs, ainsi que les radiographies du rachis, du thorax du crâne et
de la face n’ont pas été incluses. Le Gold Standard a été défini comme le diagnostic
final délivré par un orthopédiste sénior, lors du staff orthopédique journalier, lorsque
toutes les radiographies réalisées aux urgences la veille sont relues. L'algorithme
du logiciel d’intelligence artificielle a été évalué en comparant le Gold Standard
et la prédiction délivrée par l'algorithme. Nous avons cherché à évaluer s’il existe
une relation entre la précision du logiciel d’intelligence artificielle et des critères
qualitatifs comme l’âge, le sexe et la région anatomique. Résultats : Avec un Kappa
de Cohen calculé à 0.81, il existe un accord presque parfait entre le diagnostic du
chirurgien orthopédique sénior et la prédiction du logiciel d’intelligence artificielle.
L’interprétation radiologique par le logiciel d’IA affiche, en référence au Gold Standard,
une sensibilité de 89.5% et une spécificité de 92,5 %. Les résultats de l’étude mettent
en évidence une plus faible sensibilité lors de l’interprétation par l’IA des radiographies
du genou et de la jambe. Les performances du logiciel d’IA diminuent avec l’âge. Le
sexe n’a pas d’impact sur les performances du logiciel. Conclusion : L’intelligence
artificielle est une piste d’amélioration des performances diagnostiques des médecins
urgentistes dans l’interprétation des radiographies osseuses, notamment des docteurs
juniors, et qui pourrait partiellement palier au manque de spécialistes disponibles.
Néanmoins, le médecin doit rester maître de son diagnostic, et l’IA doit rester un
outil d’aide au diagnostic sur lequel s’appuyer en cas de besoin.;