Description : Suite à la découverte des antibiotiques, les succès thérapeutiques ont laissé présager
un avenir où les maladies infectieuses d’origine bactérienne seraient éradiquées.
Cependant, en moins d’un siècle, l’utilisation massive des antibiotiques à large spectre
a conduit à l’émergence de résistances réduisant ainsi les options thérapeutiques.
Mon projet de recherche vise à comprendre les altérations métaboliques et morphologiques
bactériennes induites précocement par les antibiotiques et à contribuer au développement
de tests diagnostiques rapides et fiables pour favoriser la mise en place d’antibiothérapies
plus ciblées. Grâce au suivi des modifications des divers paramètres métaboliques
et morphologiques des bactéries après traitement aux antibiotiques, nous avons montré
l’intérêt des marqueurs de viabilité tels que le DiBAC4(3), le TOPRO -3 ou encore
l’Alexa FluorTM Hydrazide pour la détection rapide (<3h) de la sensibilité des
bactéries aux antibiotiques. Nous avons notamment montré, pour la première fois, que
la carbonylation des protéines, qui est induite dans des conditions de stress oxydatif
et de vieillissement cellulaire, est un marqueur précoce universel de la sensibilité
aux antibiotiques bactéricides. Suite à cette première partie de l’étude, nous avons
souhaité comprendre les mécanismes mis en jeu par les bactéries en réponse au stress
létal causé pas les antibiotiques. Au cours de nos expériences, il a été observé que
lorsque les conditions ne permettaient plus la survie de l’organisme, un signal de
fluorescence intrinsèquement lié à la bactérie permettait de prédire l’issue fatale
après seulement 2 heures d’incubation avec l’antibiotique. En effet, suite à un traitement
avec un antibiotique bactéricide ciblant la synthèse du peptidoglycane bactérien (ampicilline),
nous avons observé une fluorescence maximale des cellules à la dose d’antibiotique
correspondant à la Concentration Minimale Inhibitrice (CMI). L’augmentation de la
fluorescence des cellules bactériennes a aussi été observé lors du traitement létal
avec un agent biocide (hypochlorite de sodium). Cependant, ce phénomène n’est plus
observable avec des antibiotiques bactériostatiques ou bactéricides qui inhibent la
synthèse protéique indiquant l’importance d’un métabolisme bactérien actif. Les corrélations
de propriétés spectrales nous ont permis de suspecter les molécules de flavines comme
étant responsables du phénomène d’autofluorescence observé. De plus, nous avons montré
une suractivation de la voie de biosynthèse des cofacteurs de type flavines et des
flavoprotéines en présence d’ampicilline. Finalement, nous avons effectué des expériences
de tri et de survie cellulaire de populations bactériennes traitées à l’ampicilline.
Nos résultats ont montré que les cellules très fluorescentes ont une survie moyenne
5 fois supérieure aux cellules peu fluorescentes. Ceci suggère que le signal de fluorescence
observé est une réponse cellulaire médiée par les composés flavonoïdes pour tenter
de survivre au traitement antibiotique. Des travaux exploratoires suggèrent que le
phénomène étudié chez les bactéries est conservé chez les levures et chez les cellules
humaines. Ces résultats ouvrent de nouvelles perspectives dans la compréhension de
la physiologie bactérienne, l’étude de la réponse bactérienne face à un stress exogène
et la surveillance rapide de la viabilité des cellules.;