Description : Rationnel : La notion de soins « futiles » ou « disproportionnés » en réanimation
est bien connue. Il existe également des séjours qui sont qualifiés a posteriori de
« non-justifiés » par les médecins1. Certains séjours apparaitraient ainsi moins pertinents
que d’autres. L'objectif de l'étude était de décrire et de comprendre les perceptions
que peuvent avoir les soignants de cette qualification par les médecins d’un séjour
en réanimation. Méthode : Nous avons réalisé une étude qualitative par entretiens
semi-dirigés auprès des soignants de trois unités de réanimation de Bourgogne Franche-Comté.
Un guide d’entretiens a été validé en amont avec un focus sur 3 questions : (1) Missions
de la réanimation (2) L’admission en réanimation (critères objectifs / critères subjectifs
/ projet de soin / état clinique) (3) L’admission non justifiée (4) Les conséquences
d’une admission en réanimation non justifiée. Une analyse des discours avec classification
par thèmes, sous-thèmes et concepts a été effectuée selon la méthodologie qualitative
habituellement utilisée. L’inclusion des participants s’est poursuivie jusqu’à saturation
des données. Résultats : Au total, 17 infirmièr(e)s et 4 aides-soignant(e)s ont été
interrogés. L’âge, les antécédents, un mauvais état général, une dégradation de la
qualité de vie et l’absence de projet thérapeutique sont des critères perçus par les
soignants participants comme pouvant expliquer la qualification par les médecins de
séjour « non-justifié ». Cette qualification peut également trouver son origine dans
certaines circonstances selon la perception des soignants : urgence de la situation
clinique, non-connaissance du dossier médical, disponibilité et/ou choix des médecins,
pression des proches et des confrères, refus de la mort. Tandis que le stress, l’angoisse,
le sentiment d’incompréhension et d’inéquité, la privation de liberté et la perte
de sens dans son travail sont considérés comme des conséquences de ce type de séjour
parmi les soignants. Par contre, l’anticipation des situations aiguës, avec l’établissement
d’un niveau d’engagement thérapeutique et d’un Advanced Care Planning, ainsi que l’évaluation
soigneuse du patient en amont de la réanimation peuvent permettre d’éviter un séjour
qui pourrait être qualifié de non-justifié a posteriori. L’implication des soignants
dans les décisions thérapeutiques en amont et pendant la réanimation sont également
des pistes à explorer. Conclusion : Le regard porté par les soignants sur les choix
qui sont faits par les médecins concernant l’admission mais également le séjour d’un
patient en réanimation et ses conséquences devrait nous inciter à inscrire systématiquement
dans le projet thérapeutique du patient, une offre en soins critiques, dans le respect
de ses choix et de ses droits, et ceci dans le cadre d’une collaboration pluri-professionnelle,
anticipée, collégiale et multidisciplinaire.;