Description : Les troubles émotionnels sont considérés comme fréquents dans la sclérose en plaque
(SEP) et ont été généralement étudiés par la reconnaissance des émotions faciales.
En revanche, l’expérience émotionnelle a été très peu analysée dans la SEP, et ses
corrélats neuro-anatomiques jamais explorés. De plus, l’intrication des difficultés
émotionnelles avec d’autres variables cliniques reste mal comprise, notamment l’alexithymie,
qui est fréquente dans cette pathologie et qui est susceptible de modifier le traitement
émotionnel.Le but de cette étude est de préciser les difficultés émotionnelles dans
la SEP, dans ses composantes de reconnaissance et d’expérience émotionnelle positive
et négative. II s’agit également d’explorer les corrélats neuro-fonctionnels de l’expérience
émotionnelle dans la SEP en général, et chez des patientes atteintes de SEP alexithymique
versus non alexithymique en particulier. Une première étude nous a permis de confirmer
l’atteinte de la capacité à reconnaitre les émotions faciales dans un groupe de patientes
SEP et ceci de façon plus marquée pour les émotions négatives. Cette étude a aussi
mis en avant une expérience émotionnelle très variable chez nos patientes avec une
intensification du vécu subjectif plaisant et déplaisant. A travers une deuxième étude
en imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), nous avons montré que cette
variabilité de l’expérience émotionnelle était sous-tendue par une grande hétérogénéité
des réponses hémodynamiques de nos patientes au niveau de structures cérébrales connues
pour leur implication dans la construction du ressenti subjectif plaisant et déplaisant.
Des analyses complémentaires en imagerie de diffusion soutiennent l’idée que ces anomalies
fonctionnelles soient liées à une atteinte structurelle notamment au niveau des boucles
limbiques et des structures fronto-insulaires qui forment le réseau de saillance.
Une troisième étude a mis en avant un effet spécifique de l’alexithymie dans les activations
cérébrales fonctionnelles des émotions positives, notamment de l’insula, tandis que
les émotions négatives semblent être influencées par la maladie et l’alexithymie comorbide.
Les analyses en imagerie de diffusion s’avèrent, pour leur part, indépendantes du
statut alexithymique. Ainsi les troubles émotionnels dans la SEP concernent tant la
capacité à reconnaitre les émotions chez l’autre qu’une modification de leur propre
expérience émotionnelle positive et négative. L’alexithymie, dont la comorbidité est
fréquente dans la SEP, accentue la présence de tels troubles au même titre que le
phénomène lésionnel inhérent à la SEP. Considérant l’implication que de tels troubles
peuvent avoir pour les patients et leur entourage familial, social et professionnel,
il semble important de prendre en compte ces aspects pour une meilleure prise en charge
de cette pathologie.;