Description : La notion d'inégalités environnementales s'est largement popularisée en France depuis
une dizaine d'années. Possédant un ancrage sanitaire marqué, elle a rencontré la problématique
des inégalités sociales de santé, elles-mêmes venues sur le devant de la scène au
début des années 2000. Après un bref rappel de ce que recouvrent les notions étroitement
imbriquées d'environnement et de santé, cette contribution met l'accent sur le renouvellement
apporté par la notion de capabilité développée par Sen à la compréhension de l'inégalité.
L'environnement est une « ressource » aujourd'hui fragilisée, à laquelle la santé
vient largement s'abreuver, avec une dimension collective, voire même communautaire,
parfois en discordance avec la qualité de la vie individuelle. Or cette plasticité
de l'environnement est difficile à appréhender dans le contexte français encore largement
sous l'emprise du contrat social établi par Rousseau à travers une démarche particulièrement
rigide et contraignante pour les individus puisqu'elle impose « l'aliénation totale
de chaque associé avec tous ses droits à toute la communauté ». Les travaux de Sen,
au contraire, poussent à envisager un paysage social profondément différencié dans
lequel interviennent de multiples critères propres aux individus et à leurs capacités.
À travers différents exemples d'inégalités dites environnementales, analysés au sein
de la région Nord-Pas-de-Calais, ce travail souligne les défaillances du « contrat
social » pour lequel, fondamentalement, l'égalité est de rigueur. Cette réintroduction
de la nature et de la matérialité remet en cause les politiques établies, démunies
pour intégrer les corollaires naturels de l'environnement que sont les limites, l'incertitude,
la responsabilité et le long terme. La question des inégalités environnementales est
ainsi une manière d'attirer l'attention sur certains dysfonctionnements du social
et la rivalité mimétique qu'il institue, source de violence, en place d'une vision
plus autonome permettant de construire une dynamique plus adaptée aux ressources existantes
dans une perspective de responsabilité collective des biens communs.;