Description : L’emprise mentale peut prendre différentes formes et être retrouvée dans de multiples
domaines, que ça soit dans la vie personnelle (au sein du couple, de la famille),
dans la vie professionnelle ou encore via les croyances religieuses ou sectaires.
Les conséquences de l’emprise sur une personne peuvent être extrêmement puissantes
et mener à une totale perte de contact avec la réalité. En partant de ce constat,
nous avons décidé de mettre en parallèle ce phénomène avec l’évaluation du discernement
qui est fait par l’expert psychiatre lors des procédures judiciaires. Pourrait-on
imaginer que, tout comme certains troubles schizophréniques ou délirants, l’emprise
mentale exercée sur un individu pourrai être à l’origine d’une abolition ou d’une
altération du discernement de ce dernier, et ainsi conduire à une irresponsabilité
pénale comme prévu par l’article 122-1 du Code Pénal ? Pour tenter de répondre à cette
question, nous avons réalisé une étude auprès des experts psychiatres de la Cour d’Appel
d’Aix-en-Provence, qui nous a permis de tirer plusieurs conclusions. Les experts ont
confirmé être confrontés fréquemment à des situations d’emprises au sein de leur pratique.
D’un point de vue médicolégal, si pour la plupart des experts il semble possible d’évoquer
un discernement altéré chez les victimes d’emprise, l’abolition totale du discernement
ne leur semble que peu adaptée à ces situations. En d’autres termes, les victimes
d’emprise restent à leurs yeux pénalement responsables de leurs actes, bien qu’ait
été souvent proposé de leur attribuer une circonstance atténuante. Dans le but d’améliorer
la prise en charge médico-judiciaire des situations d’emprise, nous avons pu réfléchir
à quelques perspectives : une formation des experts et des magistrats à la notion
d’emprise mentale ; que cette notion soit incluse dans le code pénal pour préciser
qu’elle peut constituer une cause de modification du discernement ; que les questions
de la mission expertale psychiatrique soient davantage personnalisées selon les cas
avec des questions spécifiques sur l’emprise si nécessaire.;