Description : La peste comme métaphore de l’épidémie de covid-19 qui sévit aujourd’hui ? Certes
pas, heureusement, quant aux taux de mortalité qui sont sans commune mesure. Et l’attitude
devant la mort a changé (et on peut le vérifier même par rapport à des épidémies récentes).
Mais il est des constantes comportementales (fuite des classes aisées, fake news,
complotisme, recherche de boucs émissaires, montée de l’anomie, dissolution des liens
sociaux). Si l’épidémie n’est plus considérée comme une punition divine, certains
la pensent comme une vengeance de la nature saccagée par l’homme. Il s’agit surtout
de mesurer les conséquences économiques de l’épidémie et celles de la clôture, de
l’enfermement, de la suspension des libertés d’aller et de venir, d’observer que dans
toutes les épidémies majeures, il y a eu mise en lumière et accroissement des inégalités.
Mais comment s’en sont sorti économiquement les pays et les villes frappés par la
peste au cours des siècles. Si à court terme, malgré une mortalité comprise entre
30% et 60% de la population, les « villes de la peste » ont montré une étonnante résilience
(des courbes en V ou en « aile d’oiseau »), à plus long terme les conséquences du
choc épidémiologique ont été très différentes selon les structures sociales, institutionnelles,
sectorielles des économies concernées. L’épidémie a été un révélateur des faiblesses
et un accélérateur de l’histoire. Les pays ou les cités en déclin ont vu celui-ci
se confirmer tandis que ceux qui bénéficiaient de secteurs porteurs, qui étaient dotés
d’institutions performantes et s’inscrivaient dans un espace économique en expansion
ont pu faire « contre mauvaise fortune bon cœur » et ont vu se confirmer leur dynamisme.
Après l’épidémie de covid-19, il y aura également des gagnants et des perdants. Si
les pays les mieux dotés dans les secteurs dopés par l’épidémie (la cyberéconomie,
les plateformes) semblent partir favoris, il n’est pas de fatalité. Le monde change
rapidement, un nouvel ordre productif émerge pour affronter les défis écologistes
et climatiques. L’Europe a des atouts pour réussir cette mutation à condition de tourner
le dos au capitalisme patrimonial néolibéral qui l’a embourbée dans l’austérité et
aux démons nationalistes et populistes, en s’appuyant sur ses forces démocratiques
et en comprenant que sa capacité de rebond se jouera sur l’éducation.;