Quatre textes essentiels avec lesquels Freud propose sa conception étionosographique des psycho-névroses paraissent dans les années 1895. Ces travaux, réputés sans impact en France jusqu'en 1913, date de parution de «La Doctrine de Freud et de son école» par Régis et Hesnard, ont été en réalité l'objet d'un intérêt critique beaucoup plus précoce du côté de l'Ecole Psychiatrique de Bordeaux d'où sont issus justement ces derniers auteurs. Nous reprendrons quelques uns des écrits qui sont témoins de cet intérêt et notamment une thèse de médecine soutenue à Bordeaux en juin 1896 sous la présidence d'Albert Pitres, thèse dont l'objet explicite est l'article de Freud paru trois mois plus tôt : «L'hérédité et l'étiologie des névroses». Ce travail et quelques autres dont Albert Pitres est l'instigateur fournissent de précieuses indications sur l'état du débat dans la Psychiatrie française au tournant du siècle et nous éclairent aussi bien sur les difficultés théoriques rencontrées par la doctrine de Charcot que sur l'effet de perplexité engendré par la découverte freudienne qui les transcende. Ils montrent en même temps que cet effet, qui empêchera les auteurs d'adhérer à la « jeune science », tient pour une grande part à ce que l'appareil psychique de Freud est inconcevable du point de vue du déterminisme scientifique, tout autant d'ailleurs que le procédé d'investigation qui en découle. Nous essaierons d'évaluer cette situation, conflictuelle pour Freud lui-même, en la mettant en résonance avec la crise du déterminisme dans les sciences qui surgit à la même période et nous proposerons à partir de là quelques perspectives théoriques.