Le Haut conseil de la santé publique (HCSP) français a recommandé de vacciner contre la grippe saisonnière les femmes enceintes et les personnes obèses dont l'indice de masse corporelle (IMC) est supérieur ou égal à 40 (obésité dite morbide). • Ces recommandations sont-elles justifiées au regard des données dont nous disposons mi-2012 ? Pour répondre à cette question, nous avons réalisé une synthèse de l'évaluation disponible, selon la méthode habituelle de Prescrire. • Le virus grippal A/H1N1 de 2009 (alias A/H1N1v) a prédominé dans le monde en 2009-2010. Sa circulation a décru de 2009 à 2011. • La grippe augmente les hospitalisations chez les femmes enceintes. En 2009-2010, le risque de complication grave de la grippe A/H1N1v a semblé accru durant le troisième trimestre de la grossesse. Le risque de mort périnatale de l'enfant et d'accouchement très prématuré a paru accru chez les femmes enceintes hospitalisées pour grippe A/H1N1v en fin de grossesse. • En France, au cours de l'épidémie de 2009-2010 de grippe A/H1N1v, 3 décès de femmes enceintes ont été recensés. Une seule de ces femmes n'avait pas de facteur médical connu de risque de complication de la grippe. • Le vaccin grippal est aussi immunogène chez les femmes enceintes qu'en l'absence de grossesse. Jusqu'à l'âge de 4 mois à 6 mois, les nourrissons sont généralement protégés par les anticorps maternels. • Notre recherche documentaire n'a recensé qu'un essai randomisé d'un vaccin grippal chez des femmes enceintes, réalisé avant l'émergence du virus A/H1N1v. La vaccination saisonnière a diminué la fréquence des syndromes respiratoires aigus chez les mères, et celle des grippes chez les bébés, sans effet démontré sur les complications de la grippe. Une étude de cohorte a montré une association entre la vaccination des femmes enceintes et une réduction du risque d'hospitalisation de leurs bébés, difficilement extrapolable. • L'obésité morbide est un facteur de risque d'hospitalisation pour infection respiratoire en période de grippe. Selon une méta-analyse de 6 études de cohorte, pendant les épidémies de grippe, le risque d'hospitalisation en réanimation ou de mort a été multiplié par 2 en cas d'obésité morbide. • Le vaccin grippal semble moins immunogène chez les personnes obèses. Nous n'avons pas recensé d'essai clinique d'un vaccin grippal chez des personnes obèses. • Aux États-Unis d'Amérique et dans divers pays d'Europe, la vaccination des femmes enceintes par vaccin grippal inactivé n'a pas donné lieu à un signal d'effet indésirable particulier. Les vaccins trivalents inactivés injectables commercialisés en France en 2012 ne contiennent ni virus vivant, ni conservateur mercuriel. • En pratique, chez les femmes enceintes et les personnes atteintes d'obésité morbide, les complications graves de la grippe sont très rares, même en cas de grippe A/H1N1v. La vaccination par vaccin trivalent inactivé ne semble pas avoir une efficacité importante contre la grippe, ni avoir d'effets indésirables notables. Une fois informées, aux femmes et aux personnes obèses de choisir si elles préfèrent être vaccinées. Mieux vaut vacciner surtout les femmes enceintes et les personnes obèses ayant par ailleurs d'autres facteurs de risque de complication de la grippe.