Le Brésil est un pays à la fois lointain et proche de la communauté scientifique francophone. Les collaborations dans les domaines de la recherche et de l’enseignement sont anciennes et concernent l’ensemble des données scientifiques. Ainsi, les sciences de la santé comme les sciences sociales doivent-elles à ce pays quelques-unes de leurs plus belles pages. La recherche scientifique brésilienne s’est considérablement développée ces dernières années, au point de présenter aujourd’hui une des grandes communautés de chercheurs du monde. Les coopérations entre équipes brésiliennes et étrangères se sont diversifiées tandis que le partenariat scientifique avec la France se maintenait. Ce numéro des Cahiers Santé est une illustration de cette évolution, la plupart des travaux présentés étant le fruit de collaborations entre équipes brésiliennes et françaises, en particulier de l’IRD.Le Brésil est un vaste pays aux contrastes marqués : contrastes des paysages et surtout des hommes, des couches sociales, des modes de vie, des richesses et en conséquence des indicateurs de santé. Ceux-ci illustrent la transition sanitaire actuelle, le Brésil étant entré depuis plusieurs années dans les phases dites de transition démographique et épidémiologique. La population a un accès très différencié à la santé selon ses revenus. Les plus aisés disposent d’une médecine technique, tournée vers le confort ; la classe moyenne tente d’y avoir accès à travers des assurances privées plus ou moins sérieuses ; les autres, soit la moitié de la population, n’ont accès qu’au service public de santé. Celui-ci est une médecine d’assistance gratuite aux plus démunis, payé par les cotisations obligatoires de ceux qui font tout pour éviter d’avoir à l’utiliser. Il est vrai que l’accueil est loin d’être satisfaisant. Mais les soins existent réellement et les résultats sont globalement bons, se traduisant par des taux de mortalité infantile ou générale bien plus proches de ceux des pays très développés que de ceux des pays pauvres d’Afrique et d’Asie. Pays tropical, le Brésil a souffert de grandes endémies et épidémies infectieuses liées à ces régions. Il a su, dès le début du xxe siècle, mettre en place des campagnes contre le paludisme, la fièvre jaune, la maladie de Chagas, la schistosomose intestinale et plus récemment la dengue, avec fréquemment d’excellents résultats immédiats et à long terme. Le paludisme, autrefois présent tout au long du littoral, est aujourd’hui réduit à quelques quartiers des grandes villes amazoniennes (Manaus, Belem) et à des foyers fluctuants en forêt. Les endémies infectieuses sont désormais de bien moindre importance que les maladies liées au vieillissement, à une mauvaise alimentation, à la sédentarité, sauf pour certains groupes de population, tant ruraux qu’urbains, vivant dans les parties les moins développées du pays. Les articles de ce numéro traitent ainsi surtout du Nord-Est, la première région, colonisée depuis la découverte en 1500. La culture de la canne à sucre lui a assuré richesse, développement et prédominance politique jusqu’au xixe siècle. Mais elle s’est mal adaptée aux évolutions récentes et elle est aujourd’hui la partie la plus pauvre du pays. Les articles de ce dossier traitent de quelques-unes des endémies encore importantes pour certains groupes, de la perception du service public de santé, de la mortalité infantile dans une capitale. Ils ont l’ambition de donner un aperçu d’éléments de santé dans un pays émergent et en évolution rapide dont l’expérience peut se révéler utile à d’autres.