Cet article propose un autre cadrage de la relation desdisability studiesà la sociologie du handicap comme « déviance » ou « stigmate ». On montrera leur héritage direct du travail de dénaturalisation engagé par les chercheurs qui, à partir de la fin des années 1950, ont dynamité cette notion de « déviance » et ont enquêté de façon nouvelle sur la délinquance, la toxicomanie, la folie, l’homosexualité… Eliot Freidson (1966) a déplacé le regard du « handicapé », traité comme un malade à réhabiliter, vers les « faiseurs de handicap » : quelles sont les juridictions professionnelles des spécialistes habilités à l’identifier et à le soigner et dans quelles arènes publiques le handicap s’est-il institutionnalisé en problème social ? Fred Davis (1961) a, de son côté, exploré une autre voie, proche de celle d’Erving Goffman (1963) : comment dans des situations de coprésence entre personnes avec et sans handicap visible, le stigmate est-il coproduit, réifié ou neutralisé ? Une troisième voie, celle de la revendication politique, portée par ledisability rights movement, a été retravaillée par John Kitsuse en 1980 avec sa notion de « déviance tertiaire ». Tout en assumant l’héritage des années 1960, ce concept prend acte de la capacité d’agir des personnes en situation de handicap, de revendiquer des droits, d’inventer une expérience collective et d’aménager des environnements de vie.