La loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi impose à chaque entreprise de « prévenir la pénibilité au travail ». Cette dernière est caractérisée par « une exposition, au-delà de certains seuils, à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels pouvant laisser des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé ». Elle se définit par « une intensité et une temporalité ». Les critères retenus pour le travail de nuit sont : une heure de travail entre minuit et 5 heures au moins 120 nuits par an ; pour le travail posté : une heure de travail entre minuit et 5 heures au moins 50 nuits par an. Les effets sanitaires reconnus du travail de nuit ou posté (TPN) concernent le sommeil, la vigilance, le risque accidentel, les effets métaboliques, cardiovasculaires, cancers (sein, prostate…). Les seuils d’exposition ne sont pourtant pas clairement définis dans la littérature, même si une relation dose-réponse est suspectée. Dans ce travail, nous présentons une revue de la littérature explorant la relation entre la durée d’exposition et les effets du travail de nuit. Très tôt, Knutsson et al. (1985) mettent en évidence une relation dose-réponse quasi linéaire entre le risque cardivasculaire et la durée d’exposition au TPN. Au cours des dernières décennies, nombre de travaux ont été publiés. Les mécanismes physiopathologiques impliqués (dette chronique de sommeil, l’exposition à la lumière la nuit, mélatonine, immunitaires) sont mieux précisés. Plusieurs travaux tenant compte de la relation dose-réponse ont été publiés dont le plus récent de Lin et al. (2015). Cette méta-analyse qui inclut 16 cohortes prospectives confirme la relation dose-réponse pour le risque de cancer du sein et le risque cardiovasculaire, ainsi qu’une augmentation de la mortalité globale chez les TPN. À la lumière des données actualisées de la science, la pertinence des critères de la loi tient au fait qu’elle cible les effets à long terme du TPN, tenant compte de la relation dose-réponse. Ces critères de pénibilité sont une réelle avancée et permettront dans une certaine mesure de réduire les niveaux d’expositions des travailleurs. Un avantage considérable de ce mode d’approche de la pénibilité est de tenir compte des polyexpositions fréquentes chez ces travailleurs.