Le travail en Équipe régionale ressources en soins palliatifs pédiatriques nous conduit à prendre part régulièrement à des réunions de procédure collégiale. Au fil du temps, nous avons pu repérer au cœur des échanges des phrases que nous appellerons « bloquantes ». Prononcées avec l’aplomb de l’argument d’autorité, elles sont présentées comme prévalant sur tout le reste. Le silence qui les suit confine parfois à l’effet de sidération. Elles viennent interdire l’étonnement et neutraliser le doute présent en chacun. Elles annulent la légitimité de la tension entre les principes éthiques de bienfaisance et de non-malfaisance, se prévalant généralement du premier ; et ce faisant, elles renvoient volontiers les autres participants au champ de la lâcheté et de l’abandon, générant chez eux un sentiment de disqualification. Au-delà de l’identification de ces « phrases bloquantes » que chacun peut prononcer – comment mieux les repérer ? – l’objet de notre propos est de mieux les analyser – de quoi procèdent-elles, comment peuvent-elles être explicitées ? – pour en déconstruire les effets inhibiteurs de la pensée et permettre de rebondir en renouant le fil d’un dialogue respectueux des principes de l’éthique de la discussion, entre rappel à la responsabilité singulière de la prise de parole, et mise en œuvre de la responsabilité collective de chacun – écoute, demande de reformulation, d’argumentation.