La clinique des patients transsexuels nous fait considérer que ce qui fait l’homme ou la femme n’est pas qu’une histoire d’anatomie mais relèverait davantage d’une construction singulière pour chaque sujet. La transformation hormono-chirurgicale (THC), quand elle est bien indiquée, permet incontestablement de soulager une part importante de souffrance chez ces personnes en les ré-assignant dans le sexe désiré. Elle ne fait néanmoins pas taire la question du Sujet. Nous avons ainsi observé que c’est souvent une fois la marque corporelle du genre désiré inscrite par la chirurgie, qu’une autre forme de souffrance peut faire son apparition. Ce « babyblues » comme le nomme les patients, serait davantage lié à ce passage d’une représentation imaginaire à son inscription dans le réel du corps. Souvent présent depuis l’enfance, le questionnement identitaire sera remanié au fil de l’histoire et du développement psychique de ces sujets. L’acte chirurgical en tant qu’« entame » sur le corps provoque un ensemble de bouleversements et de remaniements psychiques qui viennent réactiver l’histoire infantile de ces adultes maintenant réassignés. La « renaissance » dont parlent nos patients, vient réveiller la part infantile du sujet en leur permettant de revisiter des scènes fantasmatiques de leur histoire d’enfant et d’adolescent. À partir du suivi postopératoire d’Hortense, une jeune patiente MtF (masculin vers féminin), nous tenterons d’illustrer ce passage qui, loin d’être linéaire et continu, nous fait considérer que la rencontre avec le féminin peut être problématique. Pour cette patiente, comme beaucoup d’autres, c’est une fois le parcours de THC terminé que le féminin vient les questionner car après tout : qu’est-ce qu’être une femme ? Dans l’espace de son travail de psychothérapie et de son suivi postopératoire avec le chirurgien, Hortense nous invite à penser la question féminine autrement.