IntroductionLes nécrolyses épidermiques (NE, syndromes de Lyell et de Stevens-Johnson) sont le plus souvent déclenchées par un médicament, rarement d’origine infectieuse ou immunologique (lupus, dermatomyosite). Dans certains cas, le bilan étiologique de routine ne trouve aucune cause. Ces NE idiopathiques (NEI) sont encore peu décrites. L’objectif de cette étude était de mieux les caractériser à partir d’une série de cas.Matériel et méthodesIl s’agit d’une étude observationnelle rétrospective tricentrique française de l’ensemble des cas de NEI adulte (âge ≥ 16 ans), sur la période 01/2015 à 03/2019. Etaient inclus les patients pour lesquels il n’y avait pas d’imputabilité médicamenteuse convaincante (score ALDEN < 4), pas d’infection àMycoplasma pneumoniaeet pas de lupus ou dermatomyosite. Les données médicales étaient recueillies dans le dossier (âge, sexe, clinique, biologie, séquelles) et celles du mode de vie étaient complétées chez les patients joignables par un interrogatoire standardisé. Une analyse métagénomique et transcriptomique des biopsies cutanées est en cours.RésultatsDix-huit cas issus de 3 centres ont été inclus (12 femmes, âge médian 36 ans, tableau 1). La plupart n’avaient pas d’antécédent particulier. Le SCORTEN médian à l’admission était de 2 (0–4), le décollement maximal médian de 60 % (5–100). Onze patients (61 %) ont été pris en charge en réanimation et 3 (17 %) sont décédés. Le nombre médian d’atteinte muqueuse était de 5 (3–6) et 8/14 (57 %) ont développé des séquelles graves. La moitié des patients interrogés (6/12) déclaraient consommer des compléments alimentaires ou des herbes médicinales. Un contact possible avec des toxiques (travaux ou usine) était rapporté par 6/13 patients (46 %), et on notait que 2 patientes avaient partagé le même lieu de travail. 10/16 patients (63 %) étaient en contact avec des enfants ou rapportaient un contage viral dans la famille. La fréquence globale de ces NEI dans les centres 1 (14 cas) et 2 (3 cas) sur la période d’étude était de 17/99 (17 % ; centre 1 = 19 %, centre 2 = 11,5 %). Dans le centre 1, la fréquence des cas semble en augmentation depuis 2008, et notamment depuis 2015 (de 10 à 38 %, Fig. 1).DiscussionLe nombre de NEI pourrait être en augmentation ces dernières années. Une étude précédente dans le centre 1 avait trouvé une fréquence de 5 % de NEI (8/155) sur la période 2008–2014, majoritairement non graves et peu décollés, sans décès. Dans cette nouvelle série, associant l’expérience de 2 autres centres, les patients étaient jeunes, avaient une atteinte grave, avec 17 % de décès. Les données de mode de vie, à considérer avec précaution car purement déclaratives, pourraient suggérer la participation de micro-organismes ou de toxiques environnementaux.ConclusionL’incidence des cas de NEI doit être surveillée. Des recherches microbiologiques et toxicologiques poussées pourraient permettre de mieux comprendre leur étiologie.