IntroductionLe ponatinib est un inhibiteur de tyrosine kinase (ITK) utilisé dans le traitement de la leucémie myéloïde chronique et de la leucémie aiguë lymphoblastique (LAL) avec présence du chromosome Philadelphie, résistantes aux lignes antérieures. Les effets indésirables cutanés des inhibiteurs de tyrosine kinase sont souvent au premier plan. Nous rapportons l’observation originale d’une toxicité cutanée particulièrement sévère liée au ponatinib.ObservationUne femme de 62 ans, sans antécédent dermatologique, était adressée en consultation pour une éruption cutanée évoluant depuis un mois. Elle était suivie pour une LAL depuis 2010 et traitée par ponatinib à la posologie de 45 mg/j depuis un mois, en troisième ligne thérapeutique. L’examen clinique révélait un érythème généralis, avec desquamation ichtyosiforme, par endroits en larges lambeaux. Il existait un renforcement sur les zones de friction, ainsi qu’une hyperkératose plantaire localisée. L’examen histologique objectivait une dermite spongiforme avec hyperkératose et nécroses kératinocytaires. Quinze jours avant l’éruption, en raison d’un changement de conditionnement (comprimés à 45 mg au lieu de 15 mg), le traitement avait été accidentellement administré à trois fois la dose conseillée. Le diagnostic de toxicité cutanée de grade 4 du ponatinib était retenu. Dans ce contexte de surdosage et en l’absence d’alternative thérapeutique, le traitement était poursuivi avec reprise de la posologie initiale, en association à une corticothérapie locale de classe très forte. Une disparition des lésions était observée en 15 jours. Malgré la poursuite du pontatinib, l’évolution de l’hémopathie était rapidement défavorable, le traitement arrêté, et une prise en charge palliative proposée.DiscussionLes effets indésirables cutanés des ITK sont fréquents et apparaissent en général après un délai de quelques semaines à quelques mois. Classiquement, ces molécules induisent des réactions cutanées stéréotypées, en particulier le syndrome mains-pieds, qui se traduit par des lésions hyperkératosiques localisées aux zones d’appui. Le mécanisme physiopathologique n’est pas immuno-allergique ; il s’agit d’une toxicité du médicament, avec un effet dose-dépendant. Le tableau observé ici relève probablement du même mécanisme, mais avec une réaction généralisée du fait de la dose administrée. Un effet indésirable de grade 4 du ponatinib aurait en théorie imposé un arrêt total de la molécule, cependant chez cette malade en dernière ligne thérapeutique la poursuite du traitement associée à des soins locaux par dermocorticoïdes a été retenue.ConclusionNous rapportons une toxicité cutanée particulièrement sévère du ponatinib, survenue dans un contexte de surdosage. L’arrêt du traitement a pu être évité dans un premier temps grâce à une étroite collaboration entre hématologues et dermatologues.