But de l’étude : Dans cet article nous opérons une distinction entre la fureur qui met en jeu la dimension du corps, et le furieux qui concerne l’être de l’individu. Partant de la psychiatrie classique qui décrivait indistinctement ces deux concepts en les faisant converger avec l’état maniaque d’abord et les liant ensuite à l’état de manie-mélancolie, nous les avons distingués, en opérant une analogie entre : furieux et mélancolie, d’une part; et fureur et manie, d’autre part.
Patients et méthode : La méthode est, d’une part, clinique : elle prend appui sur les entretiens avec les patients-détenus suivis en milieu carcéral; d’autre part elle s’inscrit dans une méthodologie de recherche pluridisciplinaire visant à entrecroiser les domaines épistémologique, psychanalytique et littéraire.
Résultats et discussion : Par les apports conceptuels de la psychanalyse, nous avons isolé la surestimation de l’objet – obligée ou volontaire – en tant que phase prodromique à l’état de la fureur. Cette surestimation se révèle lorsque l’objet détient un pouvoir sur le sujet, ce, dans les deux cas de figure : objet d’amour, objet-aimé, et objet tout-puissant, objet-haï. La fureur et le furieux s’expriment alors dans un Temps 2, tandis que le Temps 1 résonne avec le processus de la mélancolie dont les trois conditions sont : perte de l’objet, ambivalence et régression de la libido dans le moi. Conclusions : La clinique en milieu carcéral et l’apport de la théorie psychanalytique freudo-lacanienne, nous permettent alors de réaliser une différence fondamentale entre le furieux et la fureur, l’un relevant du registre du moi – ou du manque-à-être – (et inaccessible à la conscience) et l’autre relevant du corps.