Les traumatismes issus des actes barbares génèrent une sémiologie proche des psychopathologies psychotiques. Nous proposons, à la suite des travaux de S. Ferenczi (1937), B. Bettelheim (1960), L.Bailly (1989) et F. Sironi (1999) une contribution à la notion de « psychose traumatique » à partir de la clinique des victimes de torture. La destruction des liens psychiques, sociaux, familiaux, culturels, ... caractérise l’anéantissement des personnes torturées. La symptomatologie d’apparence anxio-dépressive cache mal les angoisses agoniques, les sentiments de persécution, les retraits d’allure catatonique ou stuporeuse, les troubles de l’image du corps et, d’une façon générale les atteintes des bases narcissiques. La torture crée un lien d’agglutination (J. Bléger, 1981) à la scène traumatique mais surtout au tortionnaire au travers de la pulsion d’emprise. La victime est sous influence, dans une temporalité qui ne cesse de répéter, dans les reviviscences, les «figures de l’horreur». L’acte barbare hypothèque les liens de filiation et d’affiliation par ses actes de violences sexuelles, par le génocide, l’épuration ethnique ou le déplacement des populations. Détruire la sensorialité est la « technique » des tortionnaires dont l’ultime fin est la dépersonnalisation, la prise en otage entre «parle, sinon on continue» et «si tu parles, on recommence».