Substances responsables des chocs anaphylactiques peranesthésiques. Troisiéme enquête multicentrique française (1992-1994).
Auteurs : Laxenaire MC1Le suivi épidémiologique des réactions anaphylactoïdes survenant en anesthésie est assuré en France depuis 1989 par des enquêtes répétées au sein du groupe d'études des réactions anaphylactiques peranesthésiques. Les membres du groupe fournissent, pour la période d'enquête retenue, les cas des patients ayant fait une réaction anaphylactoïde peranesthésique et testés dans leur consultation d'allergo-anesthésie, leurs caractéristiques (âge, sexe) et les résultats du bilan allergologique (mécanisme du choc, substances responsables). Les deux premières enquêtes, publiées en 1990 et 1993 dans les Annales françaises d'anesthésie et de réanimation, avaient rassemblé respectivement 1 240 et 1 585 patients. L'enquête actuelle correspond à 1 730 patients, testés dans 27 consultations d'allergo-anesthésie, entre janvier 1992 et juin 1994. Les accidents sont survenus à tout âge, avec prédominance entre 10 et 50 ans, le sex ratio (femmes/hommes) a été de 2,4. Les tests allergologiques utilisés pour diagnostiquer une anaphylaxie ont été les tests cutanés dans tous les centres (prick-tests dans 21 centres, IDR dans 27 centres), avec les mêmes dilutions et les mêmes seuils de positivité. Les IgE spécifiques des substances incriminées ont été recherchées par 20 centres. Le test d'histaminolibération leucocytaire a été utilisé par dix centres. L'origine immunologique du choc (anaphylaxie IgE-dépendante) a été diagnostiquée chez 1 000 patients (57,8 %), rapportée à 1 030 substances : curarisants (59,2 %), latex (19 %), hypnotiques (5,9 %), benzodiazépines (2,1 %), morphiniques (3,5 %), substituts colloïdaux du plasma (5,0 %) antibiotiques (3,1 %) et divers autres médicaments administrés en cours d'anesthésie tels que l'aprotinine et la protamine (2,2 %). Le suxaméthonium a été à l'origine de 39,3 % des accidents aux curarisants liés à une anaphylaxie IgE-dépendante, le vécuronium de 36 %, l'atracurium de 14,5 %, le pancuronium de 4,8 %, la gallamine de 3,1 % et l'alcuronium de 2,3 %. La différence d'implication des curares dans les chocs correspond à leur fréquence d'utilisation pour le vécuronium et l'atracurium, mais pas pour le suxaméthonium (39 % des chocs et 5 % du marché des curarisants). La comparaison aux deux enquêtes précédentes confirme que plus de la moitié des chocs anaphylactoïdes peranesthésiques sont liés à une anaphylaxie. Si les curarisants restent toujours à l'origine de la majorité des chocs survenant à l'induction, on assiste au travers des trois enquêtes épidémiologiques à un accroissement des chocs au latex (respectivement 0,5 %, 12,5 % et 19 %). La responsabilité des autres produits anesthésiques, antibiotiques et substituts colloïdaux du plasma reste constante.