Ischémie myocardique silencieuse et dérivés nitrés.
Auteurs : Palma Gámiz JL1L'ischémie silencieuse (IS), généralement identifiable comme une anomalie transitoire de l'ECG non accompagnée d'angor ni de symptômes cliniques équivalents, est une observation habituelle chez les patients atteints de cardiopathie coronaire avant et après un infarctus du myocarde, ou après revascularisation coronaire chirurgicale ou angioplastique. L'IS est considérée en soi comme un facteur indépendant de risque cardiovasculaire grave. Du point de vue physiopathologique, l'IS est intimement liée à un déséquilibre myocardique en oxygène, dans lequel la demande, tant au repos qu'à l'effort, est supérieure à l'apport, les causes essentielles en étant l'artériosclérose coronaire ou le spasme artériel, ou les deux à la fois, à côté d'autres facteurs neuro-hormonaux et de coagulation qui contribuent àdessiner le tableau clinique final. L'absence d'études prospectives à grande échelle ne permet pas de déterminer avec rigueur si les traitements anti-ischémiques en usage pourraient modifier le pronostic cardiovasculaire lié à la présence d'lS. Les nitrates à action prolongée, ainsi que les β-bloquants et les antagonistes calciques de type L, ont montré un effet bénéfique sur la charge ischémique totale, améliorant non seulement le profil clinique des patients angineux et leur tolérance à l'effort, mais parvenant aussi, dans la plupart des séries publiées, à diminuer considérablement le nombre d'événements ischémiques silencieux. Le défi médical d'aujourd'hui consiste donc à déterminer si la réduction de l'IS par l'action des médicaments anti-ischémiques s'accompagne dans une même mesure d'un recul de la morbimortalité globale imputable à ce processus. Le caractère asymptomatique de ce type d'ischémie ne permettant pas une évaluation sur la base de données cliniques, il faut faire appel à des analyses spécialisées, tels que l'ECG d'effort, la méthode de Holter, la TEP, ou la scintigraphie myocardique au thallium 201, et surtout au suivi pronostique, afin d'établir l'efficacité réelle de la pharmacothérapie. La ciné-angiographie coronaire et les différentes techniques de revascularisation myocardique sont applicables lorsque l'ischémie n'est pas contrôlable du point de vue clinique et que l'on n'obtient pas non plus une réduction significative de la charge ischémique totale. Dans les situations d'ischémie pré-infarctus, certains travaux montrent que l'emploi de vasodilatateurs nitrés réduit la charge ischémique totale, améliorant le cours clinique de la maladie et réduisant significativement le nombre total d'épisodes ischémiques silencieux, bien que leur action préventive secondaire reste à démontrer. L'action anti-ischémique est plus évidente pour les événements déclenchés par l'effort physique (ergométrie) que pour ceux observés au cours de l'électrocardiographie Holter, ce qui confirme que les mécanismes inducteurs d'ischémie sont multiples et que la variabilité circadienne dépend de nombreux facteurs. C'est pourquoi le choix d'un médicament anti-ischémique doit se faire sur la base d'une connaissance approfondie des mécanismes physiopathologiques qui provoquent l'ischémie et du substrat anatomique et fonctionnel sur lequel elle se développe. Il a été clairement montré que les vasodilatateurs nitrés non seulement ont une action bénéfique dans le contrôle des événements ischémiques silencieux ou douloureux, mais qu'ils sont également utiles en tant que thérapie coadjuvante lorsque sont en outre présents des signes de dysfonction ventriculaire ischémique.