La plupart des découvertes en matière d'effets tératogènes furent la conséquence d'observations cliniques et non d'études épidémiologiques. Nous décrivons ici une expérience qui a combiné l'observation clinique et l'épidémiologie. C'est à partir des données d'un registre qu'un nouvel effet tératogène a été évoqué puis confirmé: celui du valproate de sodium (Dépakine®) vis-à-vis du spina bifida. La première hypothèse sur une telle association a été formulée en 1980 à partir d'un travail expérimental. En 1981, un cas de spina bifida chez un enfant de mère traitée est publié et l'auteur souligne l'intérêt de rechercher d'autres cas. C'est dans ce contexte qu'en septembre 1982, nous présentâmes nos résultats aux participants de la réunion de l'International Clearinghouse for Birth Defects Monitoring Systems (ICBDMS): parmi les 200 000 enfants nés dans la région Rhône-Alpes entre août 1979 et août 1982, il étaient atteints de spina bifida et nés de mère épileptique, 9 des mères ayant été traitées par du Dépakine. Les données publiées ultérieurement ont confirmé l'association. La mise en évidence de cet effet tératogène fut favorisée par la conjonction de conditions locales particulières: l'existence d'un registre de malformations, un intérêt particulier pour le spina bifida, un fort taux de prescription de Dépakine dans la région et l'appartenance du registre à l'ICBDMS. En termes de santé publique, ce travail a conduit à considérer la prise de Dépakine comme une nouvelle indication de diagnostic prénatal et à permettre la détection de 20 nouveaux cas en 10 ans dans la région France/Centre-Est.