Cette revue critique de littérature a pour objectif d'évaluer la pertinence des relations entre la neurochimie et la mémoire. Basée sur une lecture méthodologique des différentes études, elle porte sur un ensemble de travaux relatifs à l'étude des effets de divers agents neurochimiques sur la mémoire. Nous avons revu près de 200 articles qui décrivent les études relatives à l'influence des neurotransmetteurs sur les fonctions cognitives, essentiellement dans les démences de type Alzheimer (DTA). La mémoire est décrite à la lumière des données contemporaines de la neuropsychologie cognitive. Cette revue n'est pas exhaustive et nous n'avons analysé que les travaux concernant les neurotransmetteurs suivants: l'acétylcholine, le sérotonine, la noradrénaline, la dopamine, l'acide gamma aminobutyrique (GABA) et la somatostatine. Nous analysons dans les DTA les déficiences du neurotransmetteur, les modèles expérimentaux et les essais cliniques. La critique est élaborée suivant trois axes de considérations: méthodologiques, techniques et conceptuelles. Il existe un grand nombre de confusions quant aux effets des facteurs neurochimiques sur la mémoire. Il n'existe pas de consensus à l'égard de la conception de la mémoire. Ainsi, des dissociations neuropsychologiques ne sont pas recherchées du fait de tests peu appropriés. Les désordres neurochimiques sont le plus souvent hétérogènes. Enfin, on fait référence tantôt à des modèles expérimentaux, tantôt à l'utilisation de la pathologie. Pour accepter les conclusions des études sur la neuropharmacologie cognitive dans les DTA, il convient de critiquer, confronter et valider leurs méthodologies et d'attendre la confirmation par d'autres équipes, les plus sensibilisées aux approches de la neuropsychologie cognitive. Bien que les études expérimentales montrent que le système cholinergique contribue à la mémoire, et plus spécifiquement à la mémoire à long terme, les essais thérapeutiques ont donné des résultats peu concluants. Pour la sérotonine, les anomalies constatées chez les DTA sont équivoques et suggèrent d'autres influences, telles que le sommeil et l'humeur. L'action de la noradrénaline et de la dopamine semble indirecte et liée à des mécanismes de vigilance et d'éveil. Avec le système GABA, l'action amnésiante des benzodiazépines prédominerait sur la mémoire explicite, mais certaines études plus récentes mettent en évidence également une action sur les mécanismes implicites de mémoire. IL est encore trop tôt pour établir avec certitude la relation entre les sytèmes neurochimiquement définis (SND) et les fonctions cognitives. Mais avec un perfectionnement conceptuel de notre compréhension de la mémoire et des désordres mentaux et un meilleur contrôle méthodologique des études, la démarche demeure prometteuse.