L’anémie est une complication fréquente de l’insuffisance rénale chronique (IRC) au stade de la prédialyse. La carence martiale est plus fréquente que chez le sujet normal et joue un rôle essentiel dans la genèse de l’anémie. Sa correction permet d’éviter le recours aux agents stimulant l’érythropoïèse (ASE) ou de réduire leur posologie. Le traitement par le fer per os est le plus souvent mal toléré et inefficace, rendant nécessaire l’utilisation du fer intraveineux. Les nouvelles formes de fer injectable permettent d’utiliser des fortes doses et de corriger la carence martiale en une seule administration avec, pour conséquence, une préservation du capital veineux et une réduction des coûts. Nous avons étudié l’efficacité du fer dextran de bas poids moléculaire (fer DBPM) à fortes doses pour corriger la carence martiale et traiter l’anémie dans l’IRC en prédialyse. Vingt-neuf doses de 500 à 1600 mg ont été administrées chez 25 patients suivis pour IRC (DFG entre 60 et 10 ml/min par 1,73 m2) en raison d’une carence martiale définie par un coefficient de saturation de la transferrine (TSAT) inférieur à 20 % et/ou une ferritinémie inférieure à 100 μg/L et recevant un traitement par ASE dans 16 cas sur 29. Un mois après traitement, l’hémoglobine a augmenté significativement (11,4 ± 1,6 vs 10,4 ± 1,4 g/dL,p = 0,0003) parallèlement à une augmentation significative du TSAT (21,3 ± 7,3 vs 13,3 ± 3,8 %,p = 0,000003) et de la ferritinémie (286 ± 253 vs 91 ± 60 μg/L,p = 0,00005). Six patients avaient une ferritinémie supérieure à 500 μg/L après traitement exposant au risque de surcharge en fer. Leur ferritinémie était plus élevée que le reste de la population avant traitement alors que le TSAT n’était pas différent, traduisant une carence fonctionnelle. Leur hémoglobine n’a pas augmenté après traitement contrairement au reste de la population suggérant une indisponibilité du fer pour l’érythropoïèse avec accumulation dans le système réticuloendothélial. La fonction rénale n’a pas varié significativement et il n’y a eu aucun cas d’insuffisance rénale aiguë. Aucun effet secondaire immédiat n’a été observé. Trois patients ont présenté des réactions retardées à type de myalgies et arthralgies spontanément résolutives. Aucune réaction inflammatoire veineuse n’a été notée. L’administration de doses élevées de fer DBPM est efficace pour traiter l’anémie de l’IRC au stade de la prédialyse avec une tolérance satisfaisante, sans conséquence sur la fonction rénale et permet de préserver le capital veineux. Elle doit être réservée aux patients dont la ferritinémie est inférieure ou égale à 150 μg/L.