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150e anniversaire de la Folie Circulaire.

Auteurs : Pichot P1
Affiliations : 1Académie nationale de médecine, 16 rue Bonaparte, 75272 Paris cedex 06.
Date 2004, Vol 188, Num 2, pp 275-84Revue : Bulletin de l'Académie nationale de médecineType de publication : article historique; article de périodique;
Résumé

Jules Baillarger avait, le 31 janvier 1854, présenté devant l'Académie Impériale de Médecine une Lecture décrivant une nouvelle variété de folie, la folie à double forme, dont l'élément central était la survenue chez le même malade d'épisodes maniaques et dépressifs. Immédiatement son collègue, Jean-Pierre Falret, protesta de sa priorité, indiquant qu'il avait publié antérieurement une description du même trouble qu'il avait dénommé folie circulaire et, le 14 février, présenta à l'Académie une Lecture sur le sujet. Baillarger réagit par une accusation de plagiat. Il prétendit que Falret avait utilisé l'intervalle de deux semaines entre les deux Lectures pour attribuer maintenant les caractères principaux de la folie à double forme à la folie circulaire, dont la description avait peu de rapport avec la très brève note que Falret évoquait comme preuve de sa priorité. Alors que Falret montra par la suite une grande retenue dans la controverse, Baillarger réitéra et enrichit ses accusations dans plusieurs publications jusqu'à sa mort. Une étude objective des textes imprimés non seulement établit clairement la priorité de Falret, mais démontre que l'accusation de plagiat est sans fondement, car les descriptions de la folie circulaire et de la folie à double forme sont très différentes, la première étant beaucoup plus proche que la seconde de nos conceptions actuelles. La découverte de Falret marque une date fondamentale dans l'histoire de la nosologie des troubles mentaux. Contrairement à l'opinion alors généralement acceptée que l'aliénation mentale était une entité unique aux manifestations symptomatiques diverses, Falret affirma qu'il existait en psychiatrie comme dans le reste de la médecine, des maladies mentales distinctes. Si leur étiologie était encore inconnue, on pouvait les isoler en considérant leurs manifestations symptomatiques et leur évolution, comme il l'avait lui-même fait avec la folie circulaire, qui était selon lui, avec la paralysie générale, la seule vraie maladie mentale jusqu'alors identifiée. Ces principes furent adoptés par Kraepelin dont les principaux concepts nosologiques, édifiés autour de 1900, sont encore aujourd'hui admis. Kraepelin attribua la plupart des manifestations psychotiques à deux maladies, la Démence précoce (nommée plus tard schizophrénie) et la Psychose maniaco-dépressive, opposées principalement par la présence ou l'absence d'une évolution vers un état final de détérioration mentale. La folie circulaire de Falret fut incorporée dans la seconde en tant que l'une de ses multiples formes symptomatiques. Elle regagna son autonomie en 1966 lorsque Angst et Perris démontrèrent la spécificité de son hérédité et la nommèrent Trouble bipolaire. Les études récentes ont étendu les limites du trouble bien au-delà de sa description classique. Ce qu'on appelle le spectre bipolaire inclus maintenant, sur la base d'arguments cliniques, biologiques, génétiques et thérapeutiques, les manifestations purement maniaques et hypomaniaques et même certaines purement dépressives. Cent cinquante ans après sa naissance, la folie circulaire de Falret est devenue un des principaux foyers de recherche en psychiatrie.

Mot-clés auteurs
Article synthèse; Homme; Médecine; Trouble bipolaire;
 Source : PASCAL/FRANCIS INIST
 Source : MEDLINE©/Pubmed© U.S National Library of Medicine
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Pichot P. 150e anniversaire de la Folie Circulaire. Bull. Acad. Natl. Med.. 2004;188(2):275-84.
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Dernière date de mise à jour : 23/08/2017.


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