L’hypothèse principale de cette étude est de confirmer la prévalence élevée de l’alexithymie chez les toxicomanes en vérifiant son indépendance par rapport aux variables sociodémographiques (sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle). Dans un deuxième temps, le lien entre alexithymie et état dépressif chez les toxicomanes est étudié. Pour ce faire, un échantillon de 128 toxicomanes répondant aux critères DSM IV de dépendance aux substances psychoactives (alcool exclu) a été apparié selon les variables sociodémographiques à un échantillon témoin de 128 sujets. Différents instruments d’hétéro et d’auto-évaluation ont été utilisés : TAS-20 pour l’alexithymie, BDI à 13 items pour l’évaluation de la symptomatologie dépressive, et MINI. Les résultats, aussi bien en analyse dimensionnelle que catégorielle, confirment la prévalence élevée de l’alexithymie chez les toxicomanes (43,5 %) par rapport à celle des témoins (24,6 %). Cette différence est obtenue grâce à la composante émotionnelle, la composante cognitive ne différenciant pas les deux échantillons. L’alexithymie, dans la population des toxicomanes, est indépendante des variables sociodémographiques. Au BDI, 66,4 % des toxicomanes présentent une symptomatologie dépressive (significativement plus fréquente pour le sexe féminin), contre seulement 26 % des témoins. La complexité des rapports entre alexithymie et dépression est discutée, la TAS et le BDI corrélant significativement, surtout pour le facteur « difficulté à identifier ses émotions ». Dans notre étude, l’alexithymie apparaît comme thymo-dépendante.