Se connecter
Rechercher

Jusqu'à la mort accompagner la vie.

Auteurs : Bertrand MDate 1999, Vol 183, Num 5, pp 935-43Revue : Bulletin de l'Académie nationale de médecineType de publication : article de périodique;
Résumé

Nous sommes placés là devant des questions difficiles et complexes auxquelles on ne saurait répondre à coup de grands principes ou d'affirmations idéologiques, car elles renvoient à des situations douloureuses, toujours singulières, où chaque individu, de manière unique, affronte et sa vie et sa mort. Mais le débat pourtant peut se nourrir de convictions et de valeurs partagées. Ainsi, avant d'être une manière d'assumer la mort, la foi chrétienne est fondamentalement une manière d'accueillir la vie dans tous ses instants et dans la plénitude que le Christ lui a donnée. Toute la Bible et notamment le ministère de Jésus atteste de ce combat pour la vie, contre le scandale de la souffrance et les forces de mort qui sont un démenti à l'oeuvre bonne de Dieu. La souffrance n'est jamais de soi acceptable, nijustifiable, et la vérité n'est jamais de s'y soumettre comme à un destin qui aurait un sens. Et donc toute souffrance qui peut être évitée doit l'être. Quant à la mort, elle est souvent refoulée, aujourd'hui, dans les marges de nos vies et de nos sociétés, comme si elle était une sorte de mise en échec de nos pouvoirs humains et notamment ceux de la médecine. Certes ces pouvoirs existent, mais la mort n'est pas une maladie. C'est la marque naturelle de notre finitude humaine et il y a un point à partir duquel les soins ne visent plus à guérir, mais à pallier la vie qui défaille, à alléger les souffrances. D'où l'importance de ce que l'on appelle aujourd'hui les soins palliatifs. Car même quand la médecine est impuissante devant la maladie, elle peut encore quelque chose pour le malade. A cause de tout ce qui précède, le croyant ne peut que s'opposer à ce qu'il est convenu d'appeler l'euthanasie, qui n'est finalement que la réplique exacte de l'acharnement thérapeutique auquel elle s'oppose. C'est le même activisme, la même prétention, que la Bible combat, par laquelle les humains veulent rester les maîtres de la vie et de la mort. Or la mort ne se donne pas, sinon dans la violence meurtrière. Comme la vie, elle s'accueille et s'accompagne. La fin d'une vie, c'est encore la vie. Mourir est encore vivre jusqu'au dernier souffle. Et cela interroge la demande exprimée du droit à mourir « dans la dignité » quand la vie n'est plus « digne d'être vécue ». Mais de quelle dignité s'agit-il ? Aujourd'hui, ne se confond-elle pas avec l'image de l'individu moderne, maître de lui et mesure du monde, assuré de sa forme physique et d'un niveau de conscience qui lui donne le pouvoir de consentir. Comme si l'image de la dignité était toujours la même, à tous les âges, pour tous les types de maladie ou simplement d'existences. Là où cette image de la dignité se met à trembler, on découvre des dignités qui ne correspondent pas à ces critères mais qui pourtant attestent que tout « corps » peut aussi être sujet, et que nous n'en savons rien. Enfin, aucune loi ni instance morale, qu'elle soit laxiste ou restrictive, ne saurait supprimer la compassion, ni la responsabilité éthique du patient, des médecins, de l'entourage. Aucune ne saurait se substituer à cette commune exigence : jusqu'à la mort accompagner la vie.

Mot-clés auteurs
Attitude; Christianisme; Euthanasie; Religion; Soin palliatif;
 Source : PASCAL/FRANCIS INIST
 Source : MEDLINE©/Pubmed© U.S National Library of Medicine
Chercher l'article
Accès à distance aux ressources électroniques :
Sur Google Scholar :  Sur le site web de la revue : En bibliothèques :
Exporter
Citer cet article
Bertrand M. Jusqu'à la mort accompagner la vie. Bull. Acad. Natl. Med.. 1999;183(5):935-43.
Courriel(Nous ne répondons pas aux questions de santé personnelles).
Dernière date de mise à jour : 23/08/2017.


[Haut de page]

© CHU de Rouen. Toute utilisation partielle ou totale de ce document doit mentionner la source.